Je veux semer des fèves dans mon potager… oui, mais comment ?

86 comments on Je veux semer des fèves dans mon potager… oui, mais comment ?

Et si votre petit potager frappait les esprits par une culture qui sort un peu de l’ordinaire ?

Plantons le décor : l’automne, sa rentrée des classes, ses pluies, et les pieds de tomates qui pourrissent. De quoi me déprimer.

Pour faire avaler la pilule, je décide de créer une nouvelle parcelle. Ras le bol de réduire le potager aux mois d’été !

Mais que faire pousser ?

Je parcours rapidement les bouquins et les sites internet pour chercher de quoi occuper le terrain en hiver.

Soudain, mon esprit s’illumine : la culture des fèves me tape dans l’œil. En fait, c’est son utilisation comme couvert végétal en hiver qui m’inspire.

Voir s’épanouir des plantes au début du printemps et produire des légumes avant toute l’artillerie lourde ? Paf. En moins de 2 secondes, je prends ma décision. Je vais semer des fèves en novembre.

Le plus dingue dans tout ça ? Je crois n’avoir jamais goûté une fève de ma vie !

Une foule de de jardiniers entament leur projet avec un sol de misère. C’est mon cas.

Et c’est un handicap qui peut vous coller à la peau un bon moment. Un peu comme si vous vous lanciez dans un marathon sans les stands de ravitaillement.

Alors, quand on débute un nouveau potager, autant commencer avec une culture simple et peu exigeante. La fève possède ce double pouvoir : elle pousse dans des sols pauvres, et peut améliorer votre sol.

Voilà pourquoi je suis tellement excité à l’idée m’y mettre. Sans parler que la fève me fait découvrir d’autres horizons que les classiques tomates et courgettes.

Maintenant, au boulot. J’ai élaboré un plan pour tester la culture dans un petit espace. C’est ce que je vais vous montrer dans cet article.

Commençons par éviter les grandes erreurs.

Les 6 pires erreurs quand on plante des fèves

Erreur n°1 : Semer dare-dare

Imaginons que vous habitiez la Haute-Savoie et que vous vouliez semer vos graines en pleine terre au mois denovembre.

La plante pointe son nez quelques semaines plus tard.

Un jour, vient la joie des batailles de boules de neige. Le sol est couvert d’un joli duvet blanc.

Le résultat ? Tous vos pieds passent l’arme à gauche.

Mort dans la fleur de l’âge.

A vrai dire, la fève n’est pas si frileuse que ça. Elle peut tenir le coup l’hiver, contrairement à certaines collègues de potager, comme les tomates. Elle tolère un climat frais, jusqu’à -3 °C selon certaines sources.

Mais il ne faut pas pousser le bouchon trop loin.

Si vous semez des graines en automne alors que vous vivez dans une région à hiver rude, vous êtes cuit.

Erreur n°2 : Louper le coche

Trop peur du climat ? Soyons fous, semons carrément plus tard dans la saison.

Plantons au mois de mai, c’est charmant, tout ce soleil.

Une bonne idée pour vous ? Jamais de la vie !

Parce que la fève poireaute trois bons mois avant de produire ses cosses. Cela nous ramène au mois d’août. Autant dire en plein cagnard.

Et la sécheresse, la fève déteste ça.

Le résultat ? En plein été, la plante en bave et la production de cosses est réduite à peau de chagrin.

Mais pire encore : vous facilitez la venue de ses terribles ennemis : les pucerons noirs. Ces bestioles adorent la chaleur. Plus vous avancez dans la saison, plus vous êtes envahi.

A éviter.

Erreur n°3 : Semer tout schuss

Étalement dans la saison.

Voilà un des socles qui va vous faire tenir dans le temps. Et vous éviter d’être dégoûté de cette culture.

Alors faites les choses correctement.

Oubliez les semis en grosses quantités en “one-shot”. Je sais bien que cela vous titille quand vous sortez la boîte de graines du tiroir. Mais voilà ce qui se passe : trois mois plus tard, toutes vos cosses arrivent à maturité en même temps.

Vous croulez sous les récoltes. Vous allez vous en coltiner à tous les repas.

Pas très sérieux.

Erreur n°4 : Faire un choix au petit bonheur la chance

Voici la grande spécialité des semenciers : vous proposer une ribambelle de variétés.

Résultat ? Vous vous trimbalez des pieds peu productifs, et des graines riquiqui.

Je vous assure qu’en passant un peu de temps, vous trouverez une quantité de variétés à acheter.

De quoi déstabiliser des débutants en jardinage. Le plus drôle c’est que ces derniers croient être originaux en choisissant une variété qui s’écarte des sentiers battus. Ils sont capables de choisir au nom, juste parce que ça sonne bien.

“Red Epicure”, ça pourrait presque faire nom de parfum de luxe, non ?

Si vous avez un peu d’ambition, évitez ces boulettes. Lisez les instructions des boîtes de graines. Faites votre choix en toute conscience.

Erreur n°5 : Avoir la main lourde

Comment anéantir tout l’intérêt d’une légumineuse ? En apportant un tas de fertilisants dans son sol.

Une plante a besoin d’azote pour pousser. Elle le tire des bactéries du sol. Ce processus dépend de la dégradation de la matière organique.

Exception à la règle : certaines bactéries ont la formidable capacité de fixer de l’azote de l’air.

Ces bactéries vivent en association avec les racines des légumineuses, comme la fève. Voilà le deal : la plante fournit l’énergie, la bactérie apporte à la plante de l’azote assimilable.

Jackpot assuré pour la fève : les bactéries lui assurent une bonne partie du couvert, indépendamment de la richesse en azote du sol.

Mais elle peut largement s’en dispenser. Si le sol est riche en azote, elle n’hésite pas à laisser tomber ses alliées.

Mettez-vous le dans le crâne : plus vous apportez d’engrais azoté, moins les légumineuses utiliserons ce système bonus.

Oui, bien sûr, si vous fertilisez, ça poussera. Ça poussera même très bien ! Mais vous ne profitez pas du cadeau atmosphérique offert par les bactéries.

Les habitudes ont la vie dure. Quand vous préparez un parcelle, l’apport de fertilisant vous démange. Ménagez-vous. Pas d’engrais, pas de purin d’ortie, même pas un petit pipi.

Économisez-les pour une autre parcelle.

Je vous sors le deuxième effet Kiss-Cool ? Si vous fertilisez à outrance, l’excès d’azote vous attirera ces satanés pucerons noirs.

Erreur n°6 : Ne pas prendre les devants

Vous avez déjà assisté à cette scène ? Vous plantez vos pieds de tomates achetés en jardinerie. Pire : vous les avez semées, plantées et chouchoutées depuis des semaines avec une patience à toute épreuve.

Et là, Météo France vous annonce la vigilance orange dans votre département.

Le lendemain matin, vous vous lamentez devant le désastre des pieds avachis sur le sol, effondrés comme un château de cartes.

Une galère.

Épargnez cela aussi à vos fèves. Elles sont d’une extrême fragilité.

Nombre de gens font cette erreur. Ils n’ont pas le réflexe du tuteurage et voient leurs pieds déchaussés voire rompus.

Si vous plantez des variétés de grande taille et si vous êtes exposé aux rafales dans votre jardin, méfiance.

OK. Maintenant que nous avons passé en revue les erreurs classiques, place à la pratique.

Comment je procède pour planter des fèves dans mon potager cette année

Étape 1 : J’investis dans l’hyperproductivité

Je choisis la classique Aguadulce.

Pourquoi ? Parce que c’est une variété réputée productive. C’est loin d’être une naine : elle peut atteindre 1m de hauteur. Elle produit des très longues cosses, de 20 à 25 cm, contenant 8 à 9 grains.

Coup double : elle est précoce, et résiste bien au froid. Idéale pour un semis en automne.

J’aurais pu aussi sélectionner la Séville à longue cosse qui est moins haute (plus solide pour les régions ventées).

Étape 2 : J’attends le moment parfait pour ma région

Je commence mon premier semis au mois denovembre.

J’habite dans le Poitou, climat plutôt doux l’hiver.

L’idée est de semer à cette période pour profiter du climat encore tempéré. Les plants grandissent puis entrent en “hibernation”. Ils seront sur les starting blocks pour flamber au printemps.

Je compte gagner un mois d’avance sur la récolte. Pas mal !

Deuxième avantage : en produisant plus tôt, je m’évite l’invasion de pucerons de l’été.

Dernier point : je libère la place au mois de mai pour planter mes cultures d’été (tomates, courgettes).

Vous avez un climat plus rude ? Pas de panique ! Vous pouvez entamer votre premier semis au mois de février.

Je vous sens un peu paumé…. Alors résumons.

Quand planter les fèves ?

Si vous avez un climat doux (région de l’ouest et sud de la France) : tentez le semis en novembre, pour une récolte environ 6 mois plus tard, vers avril-mai.

Si vous avez un climat à hiver plus froid (région est et Nord de Loire) : faites votre semis en février ou mars pour une récolte 3 mois plus tard en mai-juin.

Si vous n’êtes pas sûr, choisissez la deuxième option, elle marche à tous les coups.

Étape 3 : Je prépare le terrain

Je choisis d’office une parcelle qui n’a jamais été utilisée en potager et j’ameublis le sol.

Je sélectionne une zone jamais exploitée, avec de la pelouse. Un peu cramée par la canicule, il faut l’avouer !

Comment procéder ? En usant de l’huile de coude, pardi.

Je réalise un travail grossier de décompactage à la fourche-bêche. Vous pourriez tout aussi bien manier la grelinette.

Le sol est dur comme la pierre. Ne faites pas comme moi : attendez une bonne pluie pour faciliter votre tâche.

J’affine ensuite la terre à l’aide d’un croc ou d’un râteau.

Une option : le semis sous couvert d’engrais verts.

Quelques semaines avant la plantation, je sème à la volée des graines d’engrais verts. Ces plantes ont la faculté de couvrir le sol tout en l’améliorant grâce à leurs racines.

L’idéal est de choisir une variété qui ne résiste pas au gel et peu extensive, comme le sarrasin.

Les fèves n’auront aucun mal à lever au sein de ce couvert d’automne qui se dégradera au cours de l’hiver.

Faute de sarrasin, j’ai tenté la moutarde blanche. Pas idéal : elle peut vite grimper et faire de l’ombre. Elle n’est pas toujours détruite pas le gel.

Alors faites vos propres essais ! Je vous renvoie à l’article sur les gestes à faire pour les engrais verts.

La moutarde peut pousser très vite !

Étape 4 : Je donne le bain aux enfants

Je trempe mes graines 2 heures dans l’eau avant le semis.

Cela accélère la germination et booste la levée. J’ai déjà utilisé cette astuce pour les haricots.

C’est un plus, c’est vrai. Mais attention à ne pas abuser. Gare au graines qui restent immergées trop longtemps et qui finissent par pourrir une fois semées.

Étape 5 : Je fais mon plan sur la comète

Le but est de faire des cultures en doubles rangs de plants rapprochés.

J’ai découvert cette astuce qui permet aux pieds de se soutenir mutuellement. Cela m’évitera de mettre en place un système de tuteurage.

Au pire, je pourrai toujours en prévoir un par la suite, en tendant une ficelle de part et d’autre de deux poteaux.

Autre bon point : j’optimise la place. Je dispose de 8 m linéaires de plants.

Je repère un premier sillon dans la longueur du rectangle, pas trop près du bord.

Si vous avez fait pousser des engrais verts, retirez une partie du couvert pour creuser vos rangs, ou couchez-les au sol, ils feront office de paillage

Je repère les rangs à l’aide de bâtons

Je rajoute un deuxième sillon parallèle au premier, à une distance de 15 cm

Je ne m’arrête pas en si bon chemin. Je dispose d’assez de place dans mon rectangle pour installer un deuxième double rang. Il doit être assez éloigné du premier pour que les plantes s’épanouissent (comptez 40 cm).

Un schéma vaut mieux qu’un beau discours.

Étape 6 : Je joue au Petit Poucet

Je dépose des graines tous les 15 cm dans les rangs.

C’est la distance réglementaire pour que les plants ne se retrouvent pas comme des parisiens dans une rame de métro en pleine heure de pointe.

J’enfonce un peu avec le pouce et je recouvre avec un peu de terre, sans trop tasser.

Selon certaines sources, on peut positionner 20 graines au mètre carrés. Avec mon système, je pourrai semer au total 48 graines dans mon rectangle. Je suis dans les clous.

Pour ce premier semis, je ne m’occupe que du premier double rang. Je me réserve le deuxième pour un semis plus tardif dans la saison.

La graine est plantée au milieu des racines de moutarde

Étape 7 : Je donne la douche aux enfants

J’arrose lors du semis.

Règle valable pour la plupart des semis : maintenez un sol assez humide pour les premiers jours.

Le climat l’automne ou de printemps est assez pluvieux pour vous épargner cette tâche d’arrosage. Le sol reste frais. Mais redoublez de vigilance si des journées de grand soleil s’annoncent.

Étape 8 : J’emmitoufle le tout

Je dépose un paillage.

La couverture permet de protéger le sol, tout en le nourrissant.

Pour ma part, pas je n’ai pas trop à réfléchir : je laisse la moutarde que j’ai semée un mois plus tôt. Je pourrai la coucher plus tard dans la saison, si nécessaire.

Dans d’autres situations, j’aurais pu déposer un mélange de tontes et de feuilles par exemple. Du foin, ou de la paille peuvent très bien faire l’affaire.

Les graines de fèves sont mastocs, elles n’auront aucun mal à traverser un paillage. Évitez juste de former une couche trop épaisse.

Étape 9 : J’attends mon heure

Je fais le pied grue devant mon rectangle…

La levée peut être longue, en moyenne 10 à 15 jours.

Parfois, jusqu’à 30 jours !

Pas de panique. La fève réagit comme votre voiture quand vous tournez la clef en hiver : plus il fait froid, plus elle met du temps à démarrer.

Étape 10 : Je remets le couvert

Début février, je sème dans mon deuxième double-rang.

Le principe d’étalement des semis, ça vous rappelle quelque chose ?

Les premiers pieds devraient avoir bien poussé. Ils donneront les premières fèves en avril. La seconde fournée arrivera à maturité en mai.

Voilà.

Vous savez tout.

A présent, à vous de jouer ! Commencez par acheter des graines en jardinerie, et repérez votre future zone de culture.

Vous avez planté des fèves : et maintenant ?

J’aimerais vous affirmer que vous avez fait le plus dur. Que ce semis va vous garantir le succès.

Désolé.

C’est déjà un premier pas. Mais le gros du boulot reste à venir.

Il va falloir arroser correctement. Il va falloir combattre les pucerons noirs. Il va falloir récolter les cosses au bon moment, ni trop jeunes, ni trop mûres. Il va falloir écosser et éplucher.

Ce n’est pas une mince affaire, loin de là.

J’attends le moment de la récolte au printemps avec une extrême impatience… mais beaucoup de crainte aussi ! Je vous ferais un bilan de ma culture, une fois la saison passée, promis.

Quant à vous, vous venez de passer la première étape, c’est chouette. Les graines ont poussé et formé les premières tiges et feuilles. Vous avez des plantes qui n’attendent qu’à s’épanouir.

Si vous avez été capable d’éviter les gaffes que font les débutants à la plantation, vous avez franchement de bonnes raisons de récolter à gogo.

Un potager productif ? Rassurez-vous, des milliers de personnes y arrivent. Le jardinage, est autant un art qu’une science. Cela demande du travail et de la persévérance. Mais la joie de récolter ses propres légumes en vaut vraiment la peine.

Cet article a été écrit par François du blog Potager du débutant.

Pour découvrir ses autres articles, vous êtes les bienvenus sur son blog. Vous y trouverez des conseils détaillés qui répondent aux interrogations qu’ont de nombreux débutants (mais pas que).

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Réponses

Les commentaires :
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  1. Alain tarn et garonne

    j’ai fait mon premier semis en octobre 2022 et le deuxième en février 2023, cette année grosse production avec 2 rangées à chaque fois et fin de production au mois de juin 2023 avant les grosses chaleurs donc pas besoin d’arroser

  2. Evelyne (Alsace)

    C est la première fois que j’ai semé des fèves
    Faut il tailler la plante et quand faut-il la récolter ?
    Si vous pouvez me conseiller
    Merci

    1. nicolas (Toulouse)

      Bonjour Evelyne,
      Non la fève ne se taille pas (sauf éventuellement la pointe quand elle est infestée de pucerons).
      La récolte se fait quand les gousses sont bien “gonflées”. La couture (ligne vert foncé qui court le long de la gousse) doit être bien visible.
      Le mieux c’est d’en cueillir une et de l’ouvrir tout de suite. En voyant la grosseur des grains, vous serez fixée.

      Avatar de nicolas
  3. Isabelle (sud de Lyon)

    Genial

  4. caroline

    Merci beaucoup.
    En plus, dans la fève tout se mange!! Les cosses comme dans mange tout; les feuilles du haut comme des épinards.

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